Je n’aurais pas su mieux le dire…

– Juste le contraire de ce que pensent critiques qui ne l’ont pas aimé. Ils disent c’est un roman sentimental.
– Non, c’est vrai ? Alors, j’ai raison. Aujourd’hui, quand un couillon veut démolir un roman, il dit qu’il est sentimental. Les couillons ne comprennent pas qu’écrire un roman, choisir les mots les plus émouvants pour provoquer la plus grande émotion possible ; ils ne comprennent pas non plus que le sentiment c’est une chose et que le sentimentalisme, c’en est une autre, que le sentimentalisme, c’est l’échec du sentiment. Et, comme les écrivains sont des lâches qui n’osent pas contredire les couillons qui ont le pouvoir et qui ont proscrit le sentiment et l’émotion, le résultat, ce sont tous ces petits romans corrects, froids, ternes et sans vie qui paraissent directement sortir du guichet d’un fonctionnaire d’avant-garde pour complaire aux critiques… Rodney a tiré avec avidité une bouffée de sa cigarette et, pendant quelques secondes, il a eu l’air absent. Mais dis-moi, a-t-il ajouté ensuite, en me regardant tout d’un coup droit dans les yeux. Le professeur cinglé du roman, c’est bien moi, n’est-ce pas?

Extrait d’A la vitesse de la lumière [La velocidad de la luz ], traduit pat Elisabeth Beyer et Aleksandar Grujicic, Actes Sud, coll. « Lettres hispaniques », 2006, 285 p. (ISBN 978-2742762767).

Un livre à livre absolument…

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *